Rétrospective de Franz Erhard Walther, figure du post-minimalisme, au Mamco de Genève

Photographie de 1. Werksatz, 1963-1969, 1 photo sur 58

© Photo Ilmari Kalkkinen – Mamco, détails en bas de page.
Le Musée d’art moderne et contemporain de Genève (Mamco) présente une large rétrospective de Franz-Erhard Walther, artiste allemand, star du post-minimalisme dont le lien avec le mouvement avait été célébré par Harald Szeemann, lors de l’exposition “When Attitudes Become Form“, en 1969, à  la Kunsthalle de Berne.
De l‘origine de la sculpture, 1958-2009, retrace cinquante ans d’activité à  travers plusieurs centaines d’à“uvres, principalement des sculptures mais aussi des dessins et des archives photographiques.

L’exposition de Franz-Erhard Walter est l’occasion d’une visite du patrimoine du modernisme. Cinquante ans de carrière d’un artiste, c’est un long parcours qui ne s’inscrit pas nécessairement dans le déroulement, ou en parallèle, de l’histoire de l’art. Dans cette rétrospective, où les travaux se suivent chronologiquement, c’est la vision d’une vie qui se dégage, la façon dont l’artiste a capitalisé un langage qui est devenu sa marque, même après les années 80.
Franz-Erhard Walther pratique son art dans le style post-minimaliste qui a fait sa réputation, et sur lequel il a fondé sa carrière, jusqu’aux dessins narratifs (2007-2009) qui forment la section des travaux les plus récents de l’artiste, et qui constituent probablement le phénomène le plus intéressant de cette exposition : comment  l’artiste  a-t-il changé / abandonné  son « langage » de création avec le temps ?
Cette question n’est pas à  mettre entre parenthèses à  côté de l’à“uvre, mais une occasion extraordinaire pour le spectateur de penser politiquement comment l’art se produit, est produit sytématiquement dans l’art contemporain : Selon le sujet ? Est-ce en fonction du marché ? Le processus obéit-il à  la logique fétichiste ou à  la jouissance créative ?
L’exposition d’à“uvres majeures de Franz-Erhard Walther est l’occasion de rappeler l’histoire du mouvement moderniste et ses contemporains les plus brillants.

Yi-hua Wu

Suite : Du Minimalisme au Post-minimalisme; un changement dans la continuité.  Par Yi-hua Wu.

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“Une autre notion de l’oeuvre, de la perception, du matériau, du temps”

Durant les années 60, l’accent mis  sur le média et ses répercussions culrelles introduisirent une nouvelle approche du travail et des matériaux dans les arts visuels. L’usage évident de structures temporelles fut réactualisé par le biais des précédentes influences Dadaïste et Futuriste; ce devint par la suite une préoccupation générale de l’avant-garde européenne et américaine.
Les tendances de ces années représentent généralement une confrontation avec le formalisme esthétique alors en vigueur dans les arts visuels. Le contenu de travaux pluridisciplinaires, tels ceux de John Cage, d’Allan Kaprow et d’autres tels le mouvement Fluxus, ou plus récemment ceux constitués de performances vidéo, d’installations sonores et d’autres formes multimédias, nécessita un nouveau contexte esthétique, par conséquent une nouvelle approche critique qui permette d’interpréter des expériences de perception plutôt que d’adopter des attitudes formelles que Michael Kirby dénomma « approche trans-sensorielle de l’art ».

sculpture

« Elle n’a pas besoin du corps », coton et bois, 250 x 270 x 36 cm. 1985. Collection privée. Photo J. Magnol

Franz Erhard Walther s’intéresse à  la relation entre la perception physique et la perception psychologique depuis 1963. En découvrant les limites des arts traditionnels et des catégories esthétiques correspondantes pour fournir la clé de leur dépendance, l’attention de Walther s’est détournée de l’objet d’art pour s’intéresser au spectateur et considérer un point de vue qui englobe le travail, les matériaux, le lieu et la dimension espace/temps.
Espace, temps, action, contradiction, sont les termes abstraits que Walther fait vivre dans son oeuvre; il crée des situations tridimensionnelles dans lesquelles le spectateur peut se confronter à  ces concepts. En fait dans ces situations, le spectateur est un de ces concepts. Ainsi qu’il le définit lui-même, « l’association des concepts formels et verbaux doit être telle que les formes et les concepts ne puissent être distingués : les concepts ramènent aux formes et les formes aux concepts.
Quand j’atteins ce but, je ne suis ni descriptif, ni lyrique ou narratif; j’utilise alors le langage comme un matériau d’artiste, comme un sculpteur utiliserait la pierre et le fer.”
Le but de Walther est donc de créer un nouveau langage visuel qui réponde à  la sensibilité du spectateur moderne; il ne s’oppose pas à  la tradition, il offre seulement de nouvelles voies à  l’expression artistique. Pour Walther : ” quand l’art divertit seulement, il appartient à  l’industrie du loisir.”
Jacques Magnol

Propos recueillis à  Genève, en novembre 1988, article paru dans L’Impact – janvier 1989.

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Franz Erhard Walther, De l’origine de la sculpture, 1958-2009. Mamco, Genève, 17 février 2010 au 2 mai 2010.

 

Franz-Erhard Walther est né en 1939 à  Fulda (Allemagne). Après ses études d’art, Beaux-Arts à  Offenbach puis supérieures à  Dusseldorf, il travailla de 1967 à  1971 à  New York où le Musée d’art moderne (MoMA) exposa son travail.

La première exposition à  Genève de Franz-Ehrard Walther a eu lieu à  la Galerie Pierre Huber en janvier 1989.

 

Illustration en haut de page : Franz Erhard Walter. Photographie de 1. Werksatz, 1963-1969, 1 photo sur 58, coll. de l’artiste, dépôt Mamco. © Photo Ilmari Kalkkinen – Mamco.

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