Radio Cité perd ses auditeurs et touche le jackpot

Deux radios genevoises viennent de recevoir de bonnes nouvelles. Le feu vert donné par Berne garantit la concession de ONE FM jusqu’en 2019, et Radio Cité se voit accorder un supplément de CHF 82’000.-

Radio Cité. La quote-part de la redevance touchée par Radio Cité en 2008 s’est montée à  CHF 340’331.-. Ce montant passe à  CHF 422’403.- en 2009 selon la nouvelle répartition décidée par le Parlement dans la Loi sur la radio et la télévision. (voir en bas de page l’évolution des montants versés). En mars 2009, selon les dernières mesures de Radiocontrol, Radio Cité enregistrait une baisse de 5000 auditeurs, passant de 12’000 à  7’000. La radio retombe ainsi bien en dessous de son taux de 1994, (0,6% en Suisse romande, selon un sondage effectué par la SSR en 1993, c’est-à -dire environ 7000 auditeurs sur les 1’300’000 suisses romands à  cette époque). Faute d’écoute, des invités refuseraient de participer à  certaines émissions de la chaîne.

Vidéo: En novembre 2007, Mme De Witt promettait d’assurer l’avenir de Radio Cité pendant plusieurs années grâce à sa fortune qu’elle qualifiait d'”impressionnante”. Un an plus tard, elle procédait à de nombreux licenciements pour “raisons économiques”. Demandera-t-elle prochainement à la Ville et à l’Etat de payer pour ses erreurs?

One FM: Le transfert de concession radio de Buzz FM à  One FM a reçu le feu vert du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC). Cette décision a été prise après que One FM eut donné des assurances quant à  l’amélioration de son offre en matière d’informations. Ce point avait empêché One FM d’obtenir une concession l’automne dernier.
Les assurances apportées par One FM d’améliorer son offre en matière d’informations, ainsi que les efforts déjà  consentis par la radio pour étoffer ses programmes dans ce domaine, ont permis au DETEC d’approuver le transfert de concession au terme d’une consultation publique. Avant même cette décision, le diffuseur avait déjà  développé son offre d’informations et engagé du personnel. Conformément aux assurances données au DETEC, One FM étoffera sous peu son offre d’informations en fin de journée.

En octobre 2008, lors de l’octroi des dernières concessions de radios régionales, le dossier de candidature de One FM avait été recalé. Le dossier de Buzz FM, qui axait son programme sur l’information, avait lui été retenu. Toutefois, ce nouveau diffuseur avait décidé début novembre de renoncer à  sa concession en faveur de One FM. La concession est valable jusqu’au 31 décembre 2019.

Radio Cité est la seule station a disposer d’une concession limitée à  l’agglomération genevoise. Les autres radios  (One FM, Lac FM, Lausanne FM et Rouge FM) disposent d’une concession pour tout l’Arc lémanique.

Évolution des montants versés aux radios locales (site de l’OFCOM, voir documents mis en lien à  droite de la page)

Jacques Magnol

Commentaire.
Radio Cité a perdu plus de 5’000 des 12’000 auditeurs comptés lorsque Jean-Claude Genecand tenait la barre. L’ancien député au Grand Conseil était un homme d’affaires avisé et néanmoins doté d’une fibre sociale forte et d’un réel humanisme. L’objectif de Jean-Claude Genecand était de développer une radio associative, de qualité, ouverte aux questions régionales; c’est sous son impulsion que fleurirent des émissions culturelles, sportives, ludiques ainsi qu’une rédaction. La maladie l’emporta, en février 2006, au moment où son projet était en passe de réussir. Malheureusement, les plus incompétents se sont succédés, tout d’abord avec le duo constitué par Gérald Sapey et Jacques Bofford, au management de style complexé-autoritaire, qui entreprit de copier une radio commerciale dont les mélopées nostalgiques leur semblaient “jeunes”, les deux gérontes taillèrent avec gourmandise dans le vif des ressources humaines en virant sèchement. Les auditeurs commencèrent à  changer de chaîne et les journalistes à  quitter le navire. Ensuite, l’incompétence de la nouvelle directrice, Mme Juteau De Witt, fit les grands titres de la presse romande.

Radio Cité disposait pourtant de tous les atouts pour devenir le premier média régional: les soutiens politiques n’ont jamais manqué, ainsi le 25 juin 2007 le Conseil Municipal de la ville de Genève s’est prononcé sur une motion urgente, enjoignant le conseil administratif à  accorder une subvention exceptionnelle de 150’000.- en faveur de Radio Cité dans le but de lui permettre de passer un cap difficile. Avec 49 oui, 17 non, 6 abstentions, le Conseil Municipal avait invité le Conseil Administratif à  entrer en matière. “Les élus municipaux ont montré leur attachement pour la radio mais aussi leur volonté d’avoir une «scène» médiatique diversifiée pas uniquement composée de médias commerciaux”. Ce soutien était conditionné au succés d’une recherche de fonds auprès du secteur privé qui n’a pas été effectuée.

En février 2008, ce fut au tour du Conseil d’Etat d’apporter son soutien pour l’octroi d’une concession: “Pour la radio – région Genève, le Conseil d’Etat souhaite que Radio Cité puisse bénéficier d’une nouvelle concession, compte tenu de sa vocation généraliste et de la professionnalisation de ses structures, qui représente aujourd’hui une garantie de qualité et de pérennité.”

Les politiques n’avaient certainement pas pris le soin d’étudier le projet qui avait laissé les journalistes sceptiques lors de la conférence de presse de Mme De Witt le 13 novembre 2008. Nous remarquions alors: “Sans expérience de la gestion de médias, la nouvelle directrice entend attirer des auditeurs avec des “talk-show” et des émissions tenues par des “grosses pointures” venues de Paris et de la RSR, par contre, elle n’a apporté aucune réponse, hors un étrange énervement, aux questions posées par les rares journalistes présents à  propos de son apport financier à  cette radio exsangue. Un louvoiement de mauvais augure. Bernard Boulens a tenté d’expliquer comment Radio Cité était reprise comme toute société commerciale, tout en restant une association !” (voir les vidéos des interventions).

Quelques mois plus tard, lors de la négociation du prix de vente des flashs d’information de la RSR à  Radio Cité, Gérard Tschopp, directeur de la Radio suisse romande, exprimait un avis différent : “Pour nous, la structure de Radio Cité a changé avec l’arrivée de Mme de Witt. Certes, elle reste non-commerciale, mais est désormais propriété d’une seule personne ou d’une seule fondation. Elle garde donc son statut associatif, mais avec des capitaux et une orientation légèrement différents.»
Ainsi la radio qui “tournait” sous la direction de Jean-Claude Genecand avec des ressources moins importantes prétend être en difficulté, malgré un budget à  la hausse et après avoir éjecté nombre de collaborateurs. Ces derniers devaient être remplacés par des”grosses pointures”, mais aucune ne s’est encore “pointée”. Mme de Witt a sabré nombre d’émissions d’information ou aux tendances vaguement culturelles car “Le côté un peu trop intello de certaines émissions faisait zapper les auditeurs”. C’était le propos du sieur Sapey qui fut le premier à  lutter contre toute forme d’information de qualité car tout néoconservateur se doit de faire obstacle à  la diffusion du savoir. Après trois ans de cette politique, la perte de 40% des auditeurs marque la négation de ces idées réductrices.
Au vu des résultats, comparer la situation au moment de la disparition de M. Genecand et celle actuelle met en évidence comment la pire incompétence a conduit à  torpiller une radio en trois ans ! Est-il bien raisonnable que la redevance finance un tel gâchis ?

JM

Mises à  jour

14 mai 2009: Luc Mégroz, un stagiaire, non journaliste, récemment licencié de Radio Cité a tenu une nouvelle conférence de presse à  la Maison des associations, pour dénoncer le mode de management de Mme De Witt qui se serait rendue coupable, selon lui, de non respect du cahier des charges de l’OFCOM; il demande le boycott de la radio et veut saisir le Conseil d’Etat ainsi que l’OFCOM pour dénoncer le mobbing en oeuvre dans la radio. Seuls, cinq des anciens collègues du meneur de jeu avaient été prévenus de l’événement et y avaient assisté. Ces collaborateurs ont indiqué qu’ils avaient reçu leurs indemnités réglementaires.
L’initiative solitaire et peu soutenue de l’ex-employé de la radio locale a surtout mis en évidence le manque de solidarité entre des employés incapables de se fédérer. Un défaut qui était apparu lors du radiothon de 2007 destiné à  réunir des fonds, mais pour lequel nombre de collaborateurs avaient été tenus à  l’écart.

Lire également:
Radio Cité change de mains. (11/2007)

Sauve qui peut à  Radio Cité
, témoignages (07/2007)

Publié dans société
Un commentaire pour “Radio Cité perd ses auditeurs et touche le jackpot
  1. Laïla dit :

    De Witt a été condamnée en 1ère instance le 11 novembre 2010, et aujourd’hui à  fin 2010, que reste t’il des “grosses pointures ” ? Décaillet a été quitté, Barrigue a été quitté, Delhoume a été quitté, finie la musique classique, quittée elle aussi, fini le cinéma, quitté lui aussi, bref : c’est une équipe de petits français qui a repris la direction et la gestion des programmes. Et la musique : finie la programmation musicale par Bresson. Désormais elle est diffusée en boucle par le groupe Lagardère. Radio Cité la plus française des stations radio qui émet sur Genève, une musique qui ressemble à  n’importe quelle autre station locale.
    La radio change, le nom reste, on aurait préféré l’inverse.