Y-a-t-il un pilote dans l’avion franco-valdo-genevois ?

Dans le cadre du cycle « Visions pour Genève » organisé par la « Fondation Braillard Architectes », plusieurs intervenants ont défendu la nécessité d’une instance qui soit responsable de la planification à  long terme du développement de l’agglomération «franco-valdo-genevoise». Pas de pilote dans l’avion pour certains, trop d’intervenants pour d’autres, cependant le Projet d’agglomération franco-valdo-genevois doit être remis à  la Confédération et à  l’Etat français pour la fin de l’année 2007. C’est peu dire que le temps presse, mais le sujet ne mobilise guère, que ce soit au niveau du public ou des politiques. Gabriel Barillier, député radical et secrétaire général de la Fédération genevoise des Métiers du Bâtiment (FMB), a relevé que la majeure partie des députés du Grand-Conseil n’avait pas saisi l’importance de l’enjeu, ce qui est pour le moins dramatique.
La définition de cette agglomération varie selon la situation des intervenants, universitaire comme Bernard Debarbieux, directeur du Département de géographie l’Université de Genève, chef d’entreprise comme Guy Vibourel, directeur général de Migros-Genève, politiques tels Claude Haegi et Gabriel Barillier.

Extraits vidéo des interventions

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Le développement de Genève ne peut se faire qu’en collaboration avec les partenaires français et il devient évident que l’agglomération devrait concevoir son développement comme s’il n’y avait pas de frontière en répartissant de manière équilibrée ses activités sur son territoire, ce qui suppose un bouleversement des mentalités. L’occasion pour Gabriel Barillier, député radical et secrétaire général de la Fédération genevoise des Métiers du Bâtiment, de fustiger une »Genève d’en haut » qui ne veut partager aucune prérogative. Il s’agit donc de résoudre le problème de communication entre différents partenaires insuffisamment à  l’écoute des autres et celui des communications avec un projet CEVA peu soutenu et des décision jugées abbérantes comme la suppression de la ligne Annecy-Genève. Un constat fait l’unanimité : le projet d’agglomération manque d’enthousiasme, de pilote visionnaire.

Pour les responsables de ce projet d’agglomération, tout l’enjeu pour le territoire genevois particulièrement attractif est de se préparer à  accueillir 200 000 nouveaux habitants et 100 000 emplois à  horizon 2030, tout en préservant l’environnement et la qualité de vie. La dimension participative du Projet d’agglomération est une attente forte pour le partenariat franco-valdo-genevois et une des principales exigences de la Confédération suisse.
Le cadre de la réflexion peut être résumé de la manière suivante :
– Le Projet d’agglomération organise le territoire de trois points de vue : l’urbanisation (espaces nécessaires aux logements, aux activités économiques et aux équipements) ; la mobilité (transports publics et individuels, mobilité douce) ; l’environnement (paysages, ressources, risques et nuisances).
– Il permet aussi la définition en commun de stratégies fixées par les politiques publiques des huit thématiques, stratégies qui influent sur la planification territoriale en fixant des objectifs à  poursuivre et en créant les conditions-cadre nécessaires.

Jacques Magnol

Commentaire d’André Corboz

« Genève comme agglomération »: ce que j’aurais voulu dire…
L’excellent débat du 26 septembre a mis en évidence l’ hypercomplexité de la thématique. Pour permettre d’aborder celle-ci sous divers autres angles qui pourraient aider à  en prendre conscience d’une façon élargie, j’aurais voulu signaler trois détours possibles.

1. Dans la discussion entamée il y a déjà  plusieurs années, on ne parle jamais de la « Regio Basiliensis », qui a pourtant réussi à  mettre des structures en place en dépit d’une complexité plus grande encore que la « Regio Genevensis », puisque elle ne concerne pas deux nations, comme à  Genève, mais trois; en outre, à  Bâle la discussion sur une structure régionale a déjà  démarré en 1963 (il existe à  ce propos diverses publications)

2. Pour mieux saisir la perspective de la « métropole genevoise », il ne serait peut-être pas inutile non plus de relire l’histoire de Genève comme « territoire élastique »; le blocage dû à  la Réforme qui sous-tend toujours la vision (ou plutôt l’absence de vision) de la Genève actuelle permettrait peut-être de considérer que ladite « métropole » pourrait retrouver des dimensions qui ont jadis été les siennes (civitas romaine, royaume burgonde, évêché de Genève, département du Léman); le rappela des zones franches pourrait également aider à  comprendre que nous avons déjà  vécu « plus largement » grâce à  des conditions politico-économiques qui avaient presque effacé les frontières.

3. Le dernier détour consisterait à  mettre une difficulté de nature culturelle en évidence : des deux côtés de la frontière, beaucoup de gens (et non seulement du »troisième âge », hélas) ne sont pas encore mentalement sortis du XIXe siècle. Pour eux, tout se passe comme si les révolutions culturelles du début du ne siècle n’avaient pas eu lieu (cubisme, dadaïsme, surréalisme, et j’en passe), si bien qu’ils ne sont pas capables de percevoir le territoire actuel comme une hyperville dans laquelle l’ex-campagne est intégrée; la notion d’harmonie, à  laquelle beaucoup se réfèrent comme s’il s’agissait d’une donnée, n’est plus valable pour comprendre le phénomène d’agglomération, qui désormais relève du collage et non plus de la continuité. Il est donc urgent de dégager les valeurs implicites qui déterminent le jugement urbain des populations pour mettre en évidence qu’elles sont périmées. Certes, le troisième Festival francophone de philosophie, qui eut lieu du 13 au 16 septembre à  Saint—Maurice sous le titre de « La beauté revient, le XXe siècle est fini », montre que même des personnages dont on pourrait pourtant supposer qu’ils disposent d’une eulture mise à  jour, n’ont pas encore intégré la disparition du géocentrisme : Le néopaléopositivisme triomphe.


Publié dans architecture et urbanisme, société