Genève: le Grand Conseil vise de nouveau la culture

Le budget 2013 de l’Etat de Genève est toujours à l’étude après son refus par le Grand Conseil en octobre dernier; de bonnes sources assurent que la Commission des finances compte, sous l’impulsion du PLR, couper 1.7 millions dans le budget de la culture, des restrictions qui toucheront surtout la création indépendante. La volonté de supprimer le Service de recherche en éducation (SRED) et ses 30 postes a occulté le peu d’intérêt que montre le canton à soutenir « la culture pour favoriser son développement » tel que prévu dans la LAEC.
Les lignes budgétaires perdantes sont : l’aide ponctuelle à la culture (-545.000 francs), l’aide à la création indépendante (-330.000), l’aide à la diffusion et aux échanges (-300.000), et celle à la Fondation pour le cinéma (-500.000).
Tout espoir de maintenir ces aides à la création n’est cependant pas perdu car le budget ne sera probablement voté qu’en mars, les milieux culturels ont donc une chance de se faire entendre avant le troisième débat.

Jacques Magnol

Notes :
– En décembre 2012, le budget de la Ville, lui, a été voté sans avoir fait l’objet de menaces de coupes comme l’a indiqué Sami Kanaan, conseiller administratif en charge de la culture.
– Lors du point presse du 7 novembre 2012, le Conseil d’Etat réaffirmait : “L’aide à la création indépendante s’inscrit dans la politique culturelle du canton visant à promouvoir la relève et la diversité artistiques au bénéfice du public genevois.”
– En 2004, des menaces identiques avaient provoqué la mobilisation des milieux culturels genevois. Culture en jeu.

 

Mise à jour: Quels arguments pour défendre le budget de la création à Genève?

Lire:
Six compagnies chorégraphiques genevoises soulignent leur importance économique. GenèveActive. 2012.
En Italie, le secteur culturel crée le plus d’emplois. GenèveActive. 2012.
En Suisse, le rôle économique du secteur culturel et créatif reste largement ignoré. GenèveActive 2009.
– Les industries culturelles et créatives, dont la matière première est la capacité à imaginer et à innover, sont devenues un secteur stratégique pour le développement de la production, de la compétitivité et de l’emploi… UNESCO
Dynamiques et enjeux économiques des industries culturelles, par Pierre-Jean Benghozi. Directeur de recherche au CNRS.
En Allemagne, l’économie culturelle et créative compte près de 238 000 firmes employant près de 500 000 personnes. Ainsi, l’économie de la créativité a non seulement acquis une importance économique évidente, elle est aussi un modèle d’économie moderne : elle offre des perspectives d’emploi supérieures à la moyenne, est un pionnier sur la voie menant à une économie basée sur le savoir et représente une source significative d’innovations.

 

 

Publié dans politique culturelle
9 commentaires pour “Genève: le Grand Conseil vise de nouveau la culture
  1. gilles jobin dit :

    Combien cette “économie” va couter en allocations chômages? 1’700’000sfr / 5000sfr = 340 mois de salaires. 340 divisé par 12 = 28 équivalent plein temps pendant un an… Arrondissons à 20 équivalent plein temps pendant un an au chômage, soit: 20*5000*12=1’200’000 Moyenne allocation chomage de 75% de 1’200’000sfr = 900’000sfr. Si on ajoute les frais de dossier et de fonctionnement du chômage on doit arriver au moins au million. Au final on “économise” 700’000sfr, mais on a 20 chômeur de plus qui ne consomment plus, ne travaillent plus, bref sont paralysés… Dans une ville comme Genève ou 20% de son budget par vers la culture, cela signifie que c’est un pan important de l’activité économique qui est décimée. C’est irresponsable, démagogique et très mal calculé messieurs les banquiers…
    J’espère que les milieux culturels organisés sauront (vite) faire un calcul moins approximatif que le mien…

  2. Alvarez dit :

    « Dans une ville comme Genève ou 20% de son budget par vers la culture, cela signifie que c’est un pan important de l’activité économique qui est décimée. » … Il faut arrêter de penser que avec des arguments économiques, libéraux, on arrêtera des décision politiques où la principal motivation n’est pas celle économiser, mais plutôt la « bêtise » de pas comprendre que la culture et la création, pour une société, c’est un peut comme l’aire qu’on respire : invisible mais vitale aux échanges humaines. Alors mobilisons nous tout de suite afin de défendre nos choix et une qualité de vie genevoise qui passe aussi par l’offre culturelle et artistique.

    • gilles jobin dit :

      Cher Alvarez, il se trouve que ce sont les libéraux qui votent les coupes… Moi, je les dénonce… Etre réaliste ne veut pas dire être libéral, être un “petit patron d’entreprise culturelle à but non lucratif” socialement responsable ne veut pas dire être de droite, tout comme être un gauchiste ne veut pas dire être un stalinien… Si c’était le cas je serais alors un stalinien libéral anarchiste! Un argument économique n’est pas forcément un argument “libéral”… On peut parler d’argent sans être en faveur du capitalisme…. Personnellement je pense que c’est la combinaison du réalisme pragmatique et de la poésie qui pourrait faire inverser la tendance, pas l’un ou l’autre. Il ne faut pas avoir honte de sa fonction sociale et savoir parler un langage commun même avec nos contradicteurs. Je pense depuis longtemps que l’on devrait faire plus d’effort pour (nous les artistes) rencontrer des politiciens de droite plutôt que de boire des canons au bar et à gauche toute! On devrait leur expliquer notre réalité plutôt que de dire qu’ils sont “bêtes”. On peut aimer l’Opéra et pas le Galpon et ne pas être “bête” pour autant! Il existe même des gens de droite beaucoup plus sensibles à la culture que pas mal d’élus d’extrêmes gauches! Plutôt que de mépriser, on devrait expliquer: la vigueur de notre “économie”, les emplois que l’on crée (dans ce cas que l’on perd), nos compétences et notre professionnalisme. Avec des discours exclusivement poétiques, sans “hard facts” on ne fait que répandre l’idée d’une culture un peu molle, gauchisante, celle des petits copains subventionnés, doux rêveurs socialement inadaptés… Tu sais comme moi que c’est tout à fait faux et que nous avons de grandes compétences et que notre domaine mérite d’être soutenu tout autant que la construction des routes ou le réseau de bus (je suis un pragmatique-excuse moi). La gestion de nos affaires donc de l’argent publique est impeccable et il n’y a pas de corruption dans nos domaines (à notre niveau tout du moins). Moi je pense que ton discours sur la culture “aussi transparente que l’air” est complémentaire au mien, pas antagoniste. Et quand au néo-libéral que je ne suis pas, il se trouve que contrairement à bien d’autre qui restent muets, je réagis publiquement. Alors dis moi Alvarez, est ce que mes arguments “économiques” ne sont pas “mobilisables” pour la cause? Je n’ai pas peur des chiffres, et je sais aussi défendre si nécessaire une culture auto-gérée, alternative et dont le box office n’est pas l’enjeu. Dans le cas qui nous concerne, selon moi, l’enjeu est l’emploi. Tu m’excuseras d’utiliser des arguments qui me semblent être adéquats au débat démocratique. Tu devrais d’ailleurs plutôt réagir au problème de la proposition de coupe qu’à la manière dont ceux qui s’y opposent réagissent… Ton commentaire pour moi veux surtout dire “tais-toi”… Je prends acte, car je ne voudrais surtout déstabiliser le mouvement.

  3. Brigitte Audeoud dit :

    Il faudrait une régionalisation du système culturel, nous n’avons pas la taille critique nécessaire pour mettre en place des projets de qualité si nous restons dans nos communes, nos villes ou même nos cantons. Une réflexion sur la formation continue interdisciplinaires, que l’on apprenne à ce parler et non à concourir tout azimut. Dans d’autres pays où il y a moins d’argent, il y a une solidarité qui se forme pour que les gens ne soient pas mis de côté, quand il faut se battre, les gens ne sont pas éparpillés, ils peuvent lutter ensemble. Ici, tout se suffit à soi même, et mieux vaut avoir un bon héritage. Enfin, oui, c’est mieux. Je ne comprends pas ce mépris pour la culture ici en Suisse romande. On ne fait que me dire que ici c’est bien (un euphémisme pur dire en fait que c’est mieux) Je sors d’une formation à Hors les murs, le centre de compétences, documentation etc. pour le nouveau cirque à Paris, est-ce que quelqu’un connaît se lieu ici? Oui, on y apprend à monter des projets pour les milieux populaires, des projets de qualité, ici nous ne parlons jamais ainsi, je n’ai jamais entendu ici en Suisse romande cet enthousiasme collectif c’est envie d’en découdre avec les projets, ce faire ensemble, cet esprit décision, et que l’on ne dise pas que c’est un sujet pour la gauche, il y a autant de gens de la droite humaniste impliqués là en France pour mettre en place une culture de qualité pour d’autres publics et une grande exigence qui sort de la formation, oui des compétences, encore des compétences et des savoirs pour résister à ce qui nous entame.

  4. Alvarez dit :

    Salut Gilles
    Trois points pour clarifier que mon commentaire ne cherche pas à fermer la bouche de personne

    1- je trouve qu’invoquer des chiffres et des statistiques économiques pour défendre une activité sociale comme l’art et la culture, dans un système ou l’économique et les chiffres tendent à nous cacher la réalité, est peux efficace pour défendre nos causes ! On crois qu’on parle le langage des nos contradicteurs (les « économicistes ») et on oublie le notre ! Celui qui défende l’urgence et le besoin pour une société d’être créative, non seulement d’avoir accès à la culture ( Genève fait énormément dans ce sens), mais aussi que ses individus puissent devenir des peintres, danseurs, acteurs etc, etc sans besoin de ce considérer tout simplement comme une « force de travail qui crée de la richesse !! »

    2- Oui t’as raison il faut, aux politiques qui proposent des coupes, leurs expliquer la réalité du terrain. D’accord ce n’est pas on invoquant la bêtise, qu‘on va arriver, mais je mes doutes que on le fera en invoquant des statistiques, que de tout façon ne tiennent pas la route par rapport à leur urgences et intérêts économiques… mais pour sortir de ce petit débat-étiquetage, mon commentaire visé le fait politique, n’est pas oublier une certaine rapport de forces qui est en train de se consolider au canton et que nous les artiste devons nous mobiliser à la manière qu’on à fait il y a deux ans quand le municipale voulait couper dans la culture indépendante.

    3- Je ne jamais parlé ni de droit ni de gauche, car la sensibilité est très difficile d’enfermer dans ces catégories… mais il faut reconnaître que dans le développement de la situation culturelle de Genève ces 20 dernières années, ça qu’on appelle la gauche est pour quelque chose !

    Eh oui, voilà la poésie de nouveau réduit au rang de l’idéalisme et la réalité dure et pure déterminé par les chiffres ! Et bien sortons de ces clichés et comme tu dis défendons nos compétences et nos activités qui sont aussi important que la construction des routes et des ponts pour une société, mais pas parce que ils sont nombreuses ou parce qu’ils rapportent beaucoup ou peu d’argent, mais parce qu’ils permettent comme la culture, de traverser, d’échanger, de ce rencontrer ! C’est tout une autre logique n’est pas.

    Pour finir et on sera d’accord tous les deux sur ce point : voyons donc comment nous allons nous mobiliser pour combattre ce politique qui cherche de nouveau à étrangler la culture indépendante à Genève.

  5. Alvarez dit :

    La parole bêtise a beaucoup de connotations en français, mais quand je l’utilise elle ne cherche à insulter ou stigmatiser, mais plutôt de rendre tangible une situation, celle de la proposition PLR au Grand Conseil qui concentre les lieux communs du toujours, l’idées reçu sur ce qui pour eux sont la culture et la création, ou pour me répéter cette idéologie néolibérale que on pourrait définir comme bêtise matérialiste de dogmes figés ! Le Marché tout puissante. L’industrie du divertissement comme seul horizon possible pour la créativité !
    Le constater ne change à rien de notre problématique qui est celle de trouver comment arrêter une politique qui pense que seulement existe ce qui est rentable, qui produit des sous !
    Loin de moi d’être naïf et considérer que en la disqualifiant on l’arrête, mais il ne faut pas être naïfs non plus et penser que seulement avec des arguments constables on se fera entendre !
    Allons, réunissons nous les indépendants et les dépendants afin de voir quelles actions entreprend. Plus vite mieux sera !

  6. wu yi-hua dit :

    Pour partager un extrait de l’entretien de Gilles Deleuze au sujet de « Qu’est-ce que la Gauche? »
    http://youtu.be/Ny-hn5Mf-Q4

  7. Jorge Gajardo Muñoz dit :

    Merci à Jacques pour ce billet. La situation est alarmante, mais ce qui m’inquiète davantage c’est l’instabilité permanente du système de soutien à la culture.

    Dès qu’on bouge une ligne, c’est l’ensemble de l’architecture qui menace de s’écrouler. Les plus fragiles sont, comme toujours, les artistes, les collectifs et les compagnies indépendantes.

    Les attaques contre la culture sont récurrentes. Quelqu’un a dit, “c’est usant”. C’est tout à fait juste.

    Mais d’où vient cette instabilité ? De la “bêtise” des politiques ou d’une attaque concertée contre les “services publics”? Est-ce que les libéraux, qui sont pour la privatisation de tous les secteurs de la vie publique sont “bêtes” quand ils s’attaquent à la culture ? Ne sont-ils pas, au contraire, cohérents en faisant du pied au mécènes, aux sponsors, en prônant les partenariats public-privé (PPP) ? Les exemples commencent à se multiplier.

    À l’inverse, les partis qui défendent le rôle de l’État dans les services publics en sont-ils encore convaincus ? On peut on douter, car les socialistes, les (ex)radicaux, les verts favorables aux PPP et aux mécènes sont de plus en plus nombreux et ce, au grand plaisir du PLR, de l’UDC et du MCG. Même le RAAC s’est plu à y croire. Et cette ancienne directrice de la Comédie, qui rêvait d’artistes et de banquiers se croisant dans le futur PAV ? Cette question vaut aussi pour le magistrat socialiste qui dirige encore pour quelques mois le Département de l’instruction publique.

    Et dans le milieu culturel (qui n’est ni de gauche de droite, bien au contraire), sommes-nous conscients que depuis plusieurs années, les attaques budgétaires contre la culture, visent en fait l’ensemble de l’action de l’État en matière d’éducation, d’environnement, de politique sociale etc.?