Le 16 septembre, le Musée d’art et d’histoire a publié la programmation qui permettra de faire redécouvrir les vastes collections du Cabinet d’arts graphiques sur le site de Charles-Galland. Le musée genevois coupe ainsi court à la polémique à propos d’une supposée fermeture du Cabinet d’arts graphiques.
Riche de quelque 350’000 œuvres sur papier, la collection du Cabinet d’arts graphiques (CdAG) du Musée d’art et d’histoire a été présentée depuis plusieurs années presque exclusivement dans le cadre d’expositions temporaires. Organisées trois fois par an en moyenne à la promenade du Pin, celles-ci attirent environ 2’000 personnes chacune. Le vaste ensemble d’œuvres de la collection ne dispose pas quant à lui d’un lieu adéquat pour être mise en valeur de manière permanente.
Afin de donner l’opportunité à un plus large public de mieux découvrir ce fonds, la décision a été prise de réintégrer les arts graphiques au bâtiment historique et site principal du MAH, rue Charles-Galland. Outre la volonté de valoriser la collection, cette démarche répond également au souhait profond d’inaugurer un dialogue dynamique entre les œuvres des différents domaines (Beaux-Arts, Arts appliqués, Archéologie, Horlogerie, émaillerie, bijouterie et miniatures), mais aussi d’examiner la grande transversalité qui les caractérise. Accueillis au premier étage du musée, les arts graphiques bénéficieront, d’une part, de salles de présentation permanente – fréquemment renouvelées au vu de la fragilité de ces matériaux -, et d’autre part, d’espaces d’exposition temporaire plus grands. Enfin, ils bénéficieront d’un lien direct avec les activités de médiation du MAH.
Dans un contexte plus large, ce développement suit la recommandation de la commission d’experts du Nouveau Musée, coprésidée par Jacques Hainard et Roger Mayou. Dans son rapport détaillant les grandes orientations à prendre, la commission préconisait l’idée d’un regroupement stratégique sous l’intitulé « une équipe, une collection et un musée ».
Réintégrer les principales activités du Cabinet d’arts graphiques à Charles-Galland souligne l’importance que le MAH accorde à cette collection en lui mettant à disposition des espaces plus conséquents, en la présentant à un public plus large et en lui offrant un contexte plus propice à son inscription dans une histoire élargie de l’art et des techniques. La cohérence de l’ensemble de la programmation s’en verra d’autant renforcée.
Programmation 2021
L’exposition Contradictions, programmée au 1er trimestre 2021 dans la grande salle 15 du Musée d’art et d’histoire, donnera une large place aux arts graphiques, en se penchant sur différents aspects du processus créatif – états successifs, essais, projets abandonnés, transferts vers d’autres techniques …
À terme, la prestigieuse collection d’œuvres sur papier sera dévoilée au cours de présentations trimestrielles, de manière à respecter les strictes conditions de conservation que sa fragilité induit.
Aujourd’hui, le public peut d’ores et déjà admirer dans les cabinets 20 et 21 les pastels de Jean-Étienne Liotard et de Maurice Quentin de la Tour, qui font partie des joyaux de la collection. Dès le mois de février 2021, cet accrochage sera modifié pour mettre à l’honneur différentes représentations de Marie-Thérèse d’Autriche par Liotard, au pastel mais aussi en miniature. Entourée des portraits de ses enfants, eux aussi dessinés par l’artiste suisse, l’impératrice sera également accompagnée de prestigieux portraits féminins.
La salle 22, désormais consacrée aux maîtres anciens, lèvera le voile sur un ensemble important de portraits anglais en manière noire signés John Smith (1652-1742). Parmi les graveurs anglais les plus éminents de sa génération, Smith a réalisé de nombreux portraits de membres de familles royales, de la noblesse ainsi que de personnalités de son époque pour souligner, entre autres, les changements profonds de politique intérieure provoqués par l’unification des royaumes d’Écosse et d’Angleterre. Cette production, contrôlée et approuvée par le Parlement, trouve un écho quelques années plus tard dans une production de médailles de la famille Dassier, célèbre lignée de graveurs genevois. La présentation confrontera les feuilles de Smith à ces médailles, une opportunité rare d’apprécier ces deux types de portraits côte-à-côte.
Réservées aux œuvres des XIXe, XXe et xxr siècles, les salles 23 et 24 s’intéresseront à la notion de l’espace chez certains graveurs et/ou dessinateurs de 1900 à 1950, notamment chez l’artiste genevoise Alice Bailly et l’avant-garde russe. Cette présentation inclura par ailleurs une sélection de bijoux de l’époque et/ou imaginés par des créateurs de cette génération.
De manière générale, ces expositions d’arts graphiques feront écho à la programmation du musée, en particulier ses deux grandes expositions annuelles.
Nouvelles activités culturelles à la promenade du Pin
La mise à disposition des salles de la promenade du Pin ouvre un large champ des possibles, pour lequel la matière « papier» a été choisie comme sujet de réflexion. Leur vocation d’espace dédié au public subsiste.
Tout en poursuivant la présentation d’expositions temporaires, le MAH souhaite y organiser des activités de médiation culturelle plus fréquentes – dans la configuration actuelle, celles-ci pâtissent de l’exiguïté des locaux et de la complexité du bâtiment. Disposer d’un espace d’accueil plus important permettra ainsi d’articuler des programmes de médiation autour de la matière « papier ».
Enfin, un souhait de longue date est en passe d’être réalisé: la création d’une salle de consultation commune à la Bibliothèque d’art et d’archéologie (BAA) et au CdAG. Le public, les étudiants et les chercheurs pourront ainsi avoir un accès privilégié, sur inscription, aux œuvres sur papier (dessins, estampes, livres d’artistes) du CdAG et aux livres précieux de la BAA. Si la collection d’arts graphiques fait l’objet d’ajouts réguliers sur le site de la collection en ligne du musée, grâce au travail soutenu des équipes de la Conservation, la découverte physique des œuvres reste une priorité.
L’atelier de conservation-restauration poursuivra quant à lui ses activités dans le respect des vœux du mécène qui avait alors permis sa création.
Histoire des arts graphiques au MAH
En 1886, un cabinet des estampes est créé au Musée Rath après l’achat de la collection Burillon. Transférée par la suite au Musée des arts décoratifs, la collection est accueillie au Grand Musée (actuel MAH) tout juste inauguré, en 1910. Faute de place, le Cabinet des estampes est transféré au 5, promenade du Pin en 1951. Douze ans plus tard, naît le Cabinet des dessins, dont l’objectif est de poursuivre une politique spécifique d’étude, d’enrichissements, d’expositions et de publications. Historiquement liée aux fonds de peinture et de sculpture, cette collection s’ouvre à l’art contemporain et renforce ses domaines d’excellence, parmi lesquels le pastel du XVIIIe siècle. Né de la fusion du Cabinet des estampes et du Cabinet des dessins, le Cabinet d’arts graphiques du Musée d’art et d’histoire, voit le jour en 2010.
Communiqué du MAH. 16 septembre 2020.