Daniel Maury, curateur et maillon clé de l’art contemporain

Daniel Maury à la galerie andata.ritorno devant Gaël Corboz

Daniel Maury fait partie de la nouvelle génération de découvreurs en voie de s’insérer dans le circuit des curateurs d’expositions. Son exposition d’œuvres de Gaël Corboz à andata.ritorno, à Genève, suit un premier accrochage réussi à Mase, un village alpin du Val d’Hérens.

L’activité sur le marché de l’art est un exercice d’équilibriste entre la culture et le commerce, entre nourrir un intérêt pour l’art et présenter des œuvres qui correspondent à la demande du moment. Les choses sont encore plus difficiles depuis que l’argent facile dicte ce que l’on montre dans les galeries médiatiques et les foires d’art dont le pouvoir ne cesse de se renforcer. Les récentes vagues de fermeture – à Genève notamment : Jancou, Saks, TM project, Ceysson et Bénétière, Art & Public, Blancpain, Evergreen, Mitterrand – ont fait fleurir les articles dubitatifs sur l’avenir de l’actuel modèle économique de la galerie traditionnelle. Bien que les fermetures de galeries aient varié, la tendance générale des ouvertures est en baisse constante. Le rapport UBS & Art Basel, basé sur la base de données Artfacts.net, répertoriant près de 6 000 galeries et comprenant uniquement les galeries qui ont exposé à au moins une grande foire d’art, indique que le nombre de nouvelles galeries créées en 2018 s’est réduit de 86% par rapport à 2008.

Un tel climat ne décourage pas les nouvelles vocations d’artistes, curateurs et autres acteurs. En Suisse romande, entre les écoles d’art de Genève, Lausanne et Sion, HEAD – ECAL – EDHEA, près de quatre cent cinquante étudiants, dont plus de soixante de plasticiens, sortent diplômés chaque année. Nombre de ces artistes en devenir vont vouloir faire carrière, être reconnus dans le circuit alternatif avant d’être représentés par une galerie qui, elle, a besoin d’œuvres à vendre.

Aussitôt qu’un artiste produit des œuvres et se pose la question de leur présentation. L’étape suivante requiert l’intervention d’un « œil » séduit par la démarche au point de vouloir la faire partager et la soutenir. Daniel Maury se place au début de ce circuit avec l’ambition d’arpenter le milieu de la création, tous sens éveillés, pour y « découvrir des artistes suisses émergents et être le premier à donner le coup d’envoi de leur carrière en leur procurant une visibilité.  Pour réussir une exposition, il faut que les visiteurs soient touchés intimement et dans un sens constructif par des œuvres qui apportent du plaisir. »

Les choix de Daniel Maury sont bien sûr guidés par sa sensibilité et son inclinaison vers des œuvres qui ont un impact très fort et reposent sur une base conceptuelle solide, tout en laissant au visiteur la possibilité de choisir son degré de lecture. Le bon côté d’un début de carrière dans l’organisation d’expositions est de pouvoir conserver l’approche romantique d’un exercice dont le profit n’est pas le but immédiat, ce que Daniel Maury reconnaît : « Je tiens à créer des expositions, faire un état des lieux sans être personnellement limité par les préoccupations commerciales qui enlèvent le côté fun de l’expérience, et permettre à l’artiste de s’exprimer librement sans que l’argent influence son travail. »

Gaël Corboz, vue de l’exposition à la galerie andata.ritorno. L’artiste a déployé ses fleurs sur des impressions de grande taille n’hésitant pas à occuper l’espace de manière tridimensionnelle

Pour la première exposition du projet curatorial Glass Temple, l’idée a été de se rendre loin des centres urbains afin de développer une expérience artistique nouvelle et authentique. Toutes produites dans le val d’Hérens, il faisait sens d’exposer les treize photographies de Pauline Humbert directement sur leur lieu de production.
La deuxième exposition Lost in Fantasy, à la galerie andata.ritorno, est aussi liée à la photographie et « invite, précise le curateur, à interroger les hiérarchies entre les techniques de représentation visuelle. En effet, les spectateurs.trices ont tendance à instinctivement juger, hiérarchiser et classer dans des catégories différentes les images dites « naturelles » et celles dites « artificielles ». Percevoir une image qui a été produite grâce à tout un attirail technologique puis informatiquement transformée à l’aide de logiciels de postproduction ne suscite pas la même réaction chez les spectateurs.trices qu’une image rendue de manière naturelle et sans traitement informatique. Dans son travail, Gaël Corboz décide de fondre ces techniques de représentation afin de créer une image nouvelle qui n’est plus possible de hiérarchiser.»

© Gaël Corboz

Lost in Fantasy, la première exposition solo de Gaël Corboz. résulte d’une sélection de douze photographies de natures mortes végétales réalisées en 2019 accompagnée d’une seconde série de dix images expérimentales réalisées entre 2018 et 2019. A travers cette exposition, Gaël Corboz fait dialoguer deux domaines souvent considérés comme inconciliables, le travail manuel et la haute technologie. En effet, l’artiste aime développer des méthodes de travail se rapprochant du bricolage afin de créer des effets de lumières flamboyants mais aussi pour radicalement déformer l’image ou encore en altérer les couleurs.

Gaël Corboz – Lost in Fantasy
Curating : Glass Temple
andata.ritorno laboratoire d’art contemporain
Exposition du 15 au 30 novembre 2019
du mercredi au samedi de 14h à 18h

Né à Sion en 1991, Daniel Maury a obtenu un bachelor en histoire de l’art et en histoire à l’Université de lausanneavant de poursuivre sa formation à l’Université de Leicester (GB) où il a obtenu un master en Art Museum and Gallery Studies. Il vit à Genève depuis 2018.

Né en 1991 de parents franco-suisses, Gaël Corboz a étudié la photographie à l’École cantonale d’art de Lausanne (ECAL). En seulement quelques années, le jeune artiste a développé une forte identité visuelle ainsi qu’une esthétique qui lui est propre. Son médium de prédilection est la photographie.

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