Roberto Zucco rentre dans l’ordre à  la Comédie de Genève

 scène

Le fait divers n’existe qu’au travers de sa mise en scène médiatique et des dramaturges se trouvent parmi le large public qu’il fascine. Bernard Marie Koltès a suivi Roberto Succo, un “serial killer” vénitien, après avoir été frappé par un avis de recherche placardé en 1988 dans le métro parisien. Il en fit ce Roberto Zucco, actuellement présenté à  la Comédie, anti-héros qui tue ceux qui l’aiment et font obstacle à  sa recherche existentielle.

 Bernard Marie Koltès, un des trois auteurs français les plus joués ( avec Jean-Luc Lagarce et Michel Vinaver), était très malade, contraint à  se déplacer en chaise roulante et se savait condamné quand il écrivit cette tragédie de la solitude, ce testament de quelqu’un qui n’a pas perdu tout espoir.

“Le balèze: Pourquoi as-tu tellement cherché la bagarre? On dirait que tu veux mourir.
Zucco: Je ne veux pas mourir. Je vais mourir.
Le balèze: Comme tout le monde, petit.
Zucco: Ce n’est pas une raison.”

Sur la scène de Christophe Perton, dix-neuf comédiens tiennent bien leur rôle comme il se doit, la révolte de Koltès est proprement apprivoisée en une série de plans au kitsch parfois poussé tels le quartier chaud, la gamine effrontée, les policiers. La mécanique des transitions bien huilée et l’esthétique léchée de cette mise en scène ont raison du message de Koltès en cent-dix minutes.

Roberto Succo (1962-1988) était un Vénitien qui tua son père et sa mère en 1981, à  l’âge de dix-neuf ans. Arrêté quelques jours plus tard il fut déclaré malade mental et interné dans un hôpital psychiatrique à  Reggio Emilia d’où il s’évada en 1986. Réfugié en France, il commit de nouveaux homicides (deux policiers, un médecin et deux adolescentes) avant de repartir en Italie. Capturé en février 1988 dans sa Vénétie natale, il tenta encore de s’évader et improvisa une conférence de presse sur le toît de la prison de Santa Bona di Treviso. Il s’est suicidé en mai 1988 dans la prison Saint-Pie X de Trévise.

Comédie de Genève. Roberto Zucco de Bernard-Marie Koltès, mise en scène de Christophe Perton.  Du 28 octobre au 8 novembre 2009.

 Sur le Web: site officiel de Bernard-Marie Koltès

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A propos de la fascination exercée par le fait divers : Les Dits et les Scènes du Fait Divers. Avec Annick Dubied.

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La Comédie présentera deux autres pièces tirées de faits divers:

Soupçons, d’après un film de Jean-Xavier de Lestrade, adaptation et mise en scène de Dorian Rossel. Du 2 au 21 février 2010.
Portrait d’une femme de Michel Vinaver, mise en scène de Anne-Marie Lazarini.  Du 20 au 30 avril 2010.

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