Règlements de comptes sanglants à la rue Rodo

Création du TMG Déambulation théâtrale pour acteurs et marionnettes imaginée par: Guy Jutard, Claude Inga Barbey et René Delcourt Mai 2015
Rififi Rue Rodo. Imaginé par Guy Jutard, Claude-Inga Barbey et René Delcourt. Photos : Cédric Vincensini.

Guy Jutard termine en beauté treize ans de direction du Théâtre des Marionnettes de Genève avec une création en forme d’enquête policière rocambolesque qui voit le public arpenter les lieux à la recherche d’un serial-killer de marionnettes. Entretien avec Guy Jutard.

 

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Dès leur arrivée dans le hall saccagé du théâtre, les spectateurs apprennent de la bouche même de Doris Ittig et Guy Jutard très angoissés que des crimes horribles ont été commis contre les marionnettes. Quelle que soit la gravité des événements le spectacle doit continuer, c’est ainsi que les spectateurs vont suivre le déroulement de l’enquête, organisés en petits groupes de quinze personnes, guidés par Claude-Inga Barbey, Pierre Mifsud, Barbara Tobola et nombre de comédiens fidèles du TMG. Le théâtre est devenu méconnaissable, nous irons jusque dans ses moindres recoins, souvent dans des espaces restreints et inattendus qui engagent spectateurs, comédiens et marionnettes dans une même aventure.

« Une comédie, une fantaisie qui est aussi
prétexte à voir d’une autre façon, avec humour, ce qui fait les ficelles de la marionnette. La position des spectateurs à l’intérieur d’un décor, leur proximité par rapport aux personnages font que l’on survole un panorama de ce qui existe autour et dans la marionnette. A-t-elle une âme, un cœur, une vie propre ? Son intérieur ne révèle-t-il pas la main du manipulateur ?
Ce semblant de vie qui anime la marionnette lorsqu’elle est manipulée est troublant et ouvre à de nombreuses interrogations qui fascinent. On sait qu’elle est utilisée notamment dans le chamanisme. Le problème du double, de la dualité est au centre de la fable et de ce spectacle déambulatoire. En travaillant à la marionnette, le comédien manipulateur ainsi que le spectateur se rendent compte qu’il y a une sorte de dédoublement de la personne à l’œuvre dans l’acte marionnettique lui-même. De fait, il faut parfois jouer l’Ange et dans le seconde qui suit, la Bête. » Guy Jutard.

Au fil de rebondissements toujours plus rocambolesques, chaque scène est prétexte à la création d’un univers spécifique en lien avec la structure des personnages ou une technique de manipulation, et chaque déplacement est l’objet d’un travail du comédien et du personnage qu’il incarne. Le public suit, surpris de cette confrontation avec autant d’univers, jusqu’au dénouement final inattendu : le criminel était un habitué des lieux.

Rififi Rue Rodo. Imaginé par Guy Jutard, Claude-Inga Barbey et René Delcourt.
Théâtre des Marionnettes de Genève. 19 mai au 7 juin 2015.

 

Entretien avec Guy Jutard :

Montrer l’image la plus large possible de la marionnette

La marionnette est d’abord pour les adultes. En quelques mots, Guy Jutard souligne la l’importance du rôle social et politique que tiennent les arts de la marionnette dans le domaine du théâtre. Durant treize ans à la tête de l’institution, Guy Jutard s’est attaché à montrer l’image la plus large possible des différentes techniques du théâtre d’objet, des marionnettes à gaine, à fils, à tige, à tringle ou autres, dans des créations destinées tour-à-tour aux tout-petits (voir : « Des bébés au théâtre »), aux adolescents et aux adultes.

La dynamique progressivement mise en place par Guy Jutard s’est appuyée sur une expérience de presque trente années de vie en compagnie théâtrale et l’apport d’un large réseau de diffusion. L’équipe genevoise qu’il a constituée dès son arrivée en puisant dans les talents locaux, a fait la part belle à la diversité des techniques, à l’éventail des thématiques et à l’élargissement des publics.

L’accueil que les spectateurs genevois et romands ont réservé à ces propositions artistiques nouvelles, n’a cessé de s’amplifier au fil des saisons. Le TMG accueille ainsi annuellement, et de façon régulière, 37’000 spectateurs (une croissance de 55 % par rapport à la période 1997/2002). Nombre d’adultes ont redécouvert cet art, à travers les productions de la maison, et par les spectacles invités, dont la dimension internationale s’est attachée à refléter le panorama de la création marionnettique contemporaine.

– Voir également : Des bébés au théâtre, est-ce vraiment sérieux ? Le théâtre pour très jeunes enfants est une chose éminemment sérieuse : les créateurs qui s’y attellent sont étonnés par l’exigence qualitative de la démarche, parfois bien supérieure à celles d’œuvres destinées aux adultes. La mémoire qu’ils conserveront de ce moment de théâtre, le souvenir des gestes, des paroles ou de la musique en surprendra plus d’un.

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