WET ! – stations urbaines #1. UN THEATRE PENTAGONE- RE- WET !

flyer re-wet

Avec la création de WET ! en septembre 2006 sturmfrei avait investi la serre du Théâtre de l’Orangerie  pour présenter deux textes d’Elfriede Jelinek présentés à  cette occasion Je voudrais être légère et Sens : indifférent. Corps : inutile . Les spectateurs furent convoqués au lever et / ou au coucher du soleil, un horaire insolite impliquant concrètement et intimement les corps.
La création RE-WET ! dans la black box du Théâtre du Grütli montrera un travail totalement différent et un spectacle complètement nouveau auquel Michèle Pralong – co-directrice du Grütli – nous initie :

à€ qui profite le crime ?
D’une certaine manière, les objets jelinekiens travaillés par Maya Bà¶sch se répondent les uns les autres. Ainsi des trois derniers: d’abord Wet !, un spectacle joué dans une serre par trois comédiennes au lever et au coucher du soleil ; puis stations urbaines #1. UN THEATRE PENTAGONE, installation sonore de la pièce Ein Sportstück posée sur le toit de St-Gervais ; enfin cette recréation prévue pour janvier 08 : RE-Wet !, greffe des deux courts essais de Wet! dans la black box du Grütli : mêmes textes caustiques, mêmes comédiennes, mais dramaturgie différente. En quoi ? C’est là  que la séquence des trois propositions scéniques est révélatrice.

 Le spectateur porté aux nues
On peut toujours se demander chez Jelinek, passionnée de romans policiers : à  qui profite le crime, à  qui profitent la sape de cette écriture, l’ironie de cette écriture ?
Prenons les deux dramuscules qui forment le corps textuel de Wet ! et RE-Wet !: dans Sens : indifférent. Corps : inutile, l’ironie profite à  l’auteur. C’est l’auteur qui est posé au centre de tout acte théâtral, omnipotent, abuseur, intouchable, premier, même s’il puise à  la grande foule de ses devanciers ; dans Je voudrais être légère, c’est au spectateur que les mots profitent, au sens presque nourricier du terme puisqu’on le voit, ce spectateur, grandir, enfler au fil d’un argumentaire fantaisiste qui s’invente sous nos yeux. Jusqu’à  cette lapalissade éhontée qui renvoie toutes les théories sur le comédien dos à  dos : « Seul le spectateur est vrai. ».
Ainsi, qu’est-ce que Wet !ordonne : « Qu’il (le comédien) débarrasse les planches ! » ; que l’auteur et le spectateur, magnifiés, occupent le terrain !
Manière forte, et ironique bien sûr, de court-circuiter toute analyse de l’illusion théâtrale centrée sur le jeu.
Ce spectateur porté aux nues, Maya Bà¶sch l’invente littéralement dans Un théâtre pentagone. Soit 5 heures de texte travaillées par 13 comédiens pendant 4 mois dans une cabine d’enregistrement et présentées en installation sonore et visuelle pour un spectateur à  la fois. Seul le spectateur est vrai. Posté dans le ciel genevois, isolé face à  la ville, matraqué par la prolifération des voix d’Ein Sportstück, le spectateur est celui de qui tout part et à  qui tout arrive, un noyau sensoriel sur-puissant qui ne cesse toutefois de se poser des questions sur ces égards à“il-du-prince qui lui sont faits, au nom d’une vérité suprême qu’il incarnerait.

 L’auteur placé au centre
Et dans ce Sportstück de plein ciel pour un spectateur vrai, quelle figure trouve-t-on constamment pointée, mise à  la question, contaminant peu à  peu tout le texte ? « Madame l’auteure », cette « femme au goître bruyant ».
Maya Bà¶sch l’introduit donc en plein centre de RE-Wet !puisque le coeur scénographique de ce spectacle sera une (vraie) auteure au travail. Chaque soir, une auteure sera là  pour écrire en direct sur le théâtre, pour répondre de sa fonction de dramaturge (au sens allemand de dramatiker, auteur de théâtre), pour examiner les pouvoirs du scripteur théâtral. Histoire d’ouvrir une discussion fondamentale sur la représentation et sur les différentes fonctions de la pratique théâtrale.

Wet 2006

Avec “WET !” en septembre 2006 sturmfrei avait investi la serre du Théâtre de l’Orangerie(Photo Regis Golay, Federal Bureaux, 2006)

Et le comédien brocardé
Ainsi, le comédien se retrouve-t-il à  nouveau excentré. Après avoir été physiquement effacé dans un THEATRE PENTAGONE (encore que les voix de stations urbaines #1 soient terriblement musclées, nervées, carnées ), le voici repoussé dans RE-Wet ! vers les marges de l’acte théâtral. Et c’est bien cette dramaturgie-là  qui va structurer la pièce : la bataille de trois comédiennes, qui commencent à  parler le texte dans des vitrines jouxtant la salle de spectacle. Bataille pour prendre place, au moins acoustiquement, dans un espace a priori donné à  des auteurs et à  des spectateurs, véritables alliés du vrai.
Comme si Jelinek suggérait une lutte des classes théâtrale, engluée dans ce sado-masochisme propre aux relations scéniques. Lutte entre celui qui donne les mots, celui qui les transmet et celui qui finalement les reçoit. Qui a le pouvoir ? Et quel pouvoir ? Car tout se calque chez Jelinek sur le modèle dominant-dominé.
Dramaturgie du conflit donc, entre les trois instances fondatrices du théâtre : celui qui écrit, celui qui parle et celui qui écoute. Avec toujours la même question fondamentale : comment dire une langue qui prend tout à  la fois la place du personnage et du comédien (« Les acteurs sont la parole, ils ne parlent pas ») ? Comment habiter sur scène un corps donné dès le titre pour inutile ?
Dans Wet !,il y avait paradoxe. Paradoxe de trois actrices qui viennent dire qu’elles ne peuvent rien dire. Dans RE-Wet !, il y aura extension de la zone de combat, conquête de l’espace. Et production de commentaires sur le théâtre.

 Michèle Pralong

 

RE- WET !
Je voudrais être légère et Sens : indifférent. corps : inutile d’Elfriede Jelinek, conception-mise en scène : Maya Bà¶sch / compagnie sturmfrei, du 22 au 27 janvier 2008 – Théâtre du Grütli (black box)

 

Note: Avec la création de WET ! en septembre 2006 sturmfrei avait investi la serre du Théâtre de l’Orangerie pour présenter es deux textes d’Elfriede Jelinek présentés à  cette occasion Je voudrais être légère et Sens : indifférent. Corps : inutile . Les spectateurs furent convoqués au lever et / ou au coucher du soleil, un horaire insolite impliquant concrètement et intimement les corps.
La création RE-WET ! dans la black box du Théâtre du Grütli exige un nouveau / autre travail sur l’espace. Inventer un dispositif qui peut ouvrir aux questions posées dans son écriture, aux questions liées au théâtre sans tomber dans un piège, ni annuler sa propre force, celle de la provocation, de l’ironie et de la caricature.

Mise à  jour: 

 RE-WET ! (reprise)
26 novembre 2009 / 20h30.
Grü/Théâtre de Grütli – Genève
Dans le cadre des Journées de  Théâtre Contemporain

 

flyer plateforme

 

Publié dans littérature, théâtre