Lors de la représentation de « Bambiland » de Claudia Bosse à Vienne en octobre 2008. © Yi-hua Wu.
Forums GenèveActive au Grü
Comment enseigner l’indiscipline ?
Comment les artistes évoluent-ils dans ces espaces subjectifs ?
Mardi 22 juin 2010. De 12h15 à 13h30 au Théâtre du Grütli
Intervenants :
– Marianne Mathey, doyenne du centre professionnel des arts appliqués.
– Yi-hua Wu, doctorante Arts Plastiques, Université Paris 8.
– Patrick de Rham, directeur du festival Les Urbaines, Lausanne.
Modération: Jacques Magnol, journaliste, co-fondateur de GenèveActive.ch
Ce débat constitue une discussion préparatoire au prochain événement qui aura lieu en septembre 2010.
Comment enseigner l’indiscipline ?
Au début du 19e siècle, l’essor de la modernité allait accompagner celui de la disciplinarisation, soit un cloisonnement des disciplines au nom de la mise en ordre et de l’autonomie. La remise en cause tarda un peu, ce n’est que près de cent cinquante ans plus tard que John Cage, Merce Cunningham, Robert Rauschenberg et David Tudor présentèrent le premier spectacle total, « mixed media », qui réunissait la musique, la peinture, la danse, la poésie, la projection d’images et d’autres actions.
Aujourd’hui, l’art contemporain, la danse et le théâtre font largement appel à l’inter, la pluri ou la trans-disciplinarité qui constituent autant de transgression des barrières propres aux disciplines dans un mécanisme de production inerte. Le mouvement suscite questions et recherches.
Au début des années 2000, Michel Ritter, fondateur de Fri-Art, considérait la pluridisciplinarité comme une tarte à la crème devenue envahissante. Dans Le spectateur émancipé, Jacques Rancière constate que « Nous avons aujourd’hui du théâtre sans parole et de la danse parlée; des installations et des performances en guise d’oeuvres plastiques; des projections vidéo transformées en cycles de fresques; des photographies traitées en tableaux vivants ou peintures d’histoire; de la sculpture métamorphosée en show multimédia, et autres combinaisons. » Le philosophe voit alors trois manières de comprendre et pratiquer ce mélange des genres : « la réactualisation de l’art total. Celle-ci était supposée être l’apothéose de l’art devenue vie. Elle tend plutôt à être aujourd’hui celle de quelques égos artistiques surdimensionnés ou d’une forme d’activisme consumériste, sinon les deux à la fois. » ; « l’idée d’une hybridation des moyens de l’art propres à la réalité postmoderne de l’échange incessant des rôles et des identités » ; et une troisième manière qui propose « de révoquer le privilège de vitalité et de puissance communautaire accordé à la scène théâtrale pour la remettre sur un pied d’égalité avec la narration d’une histoire, la lecture d’un livre ou le regard posé sur une image».
L’intérêt de la remise en cause des disciplines
La juxtaposition ou l’amalgame de disciplines gardant chacune sa spécificité ne crée pas une nouvelle discipline, c’est leur remise en cause qui constitue l’aspect le plus intéressant. Parmi les exemples de mise en oeuvre d’autres stratégies présentées récemment en Suisse, voyons Claudia Bosse qui s’approprie des attributs de la danse, de l’architecture et de l’art contemporain dans une forme de théâtre-exposé/dansé : Les Perses (2006) au Théâtre du Grütli, Phèdre (2008) à la Salle du Faubourg, et Bambiland (2008) à Vienne, par exemple.
Avec Stations Urbaines (2007) sur le toit du Théâtre Saint-Gervais, Maya Boesch a présenté un dispositif nouveau dans une recherche de site spécifique et de rapport au spectateur qui impliquait la disparition du corps des comédiens.
A la Comédie de Genève, pour Llà¡mame mariachi (2009) la Ribot a redimensionné le mouvement de la danse au moyen de caméras qui ont permis de prendre conscience d’un autre mouvement que celui du corps dansant. L’artiste a dévoilé une autre logique, elle a mis une trajectoire en évidence dans un système de montage qui remplaçait la scène.
Présenté en 2009 par le Kunsthaus et la Haus für Konkrete Kunst de Zurich, Tino Sehgal, économiste de formation et star de l’art contemporain, est encore plus libre de s’affranchir des limites posées par les disciplines, Il utilise les techniques de la danse et du théâtre dans le contexte de l’exposition.
Face à ces pratiques, comment le système pédagogique peut-il protéger l’ordre établi du savoir institutionnel tout en accompagnant et assistant la plongée dans l’inconnu que représente la mise en dialogue de différentes perpectives disciplinaires ? Comment les artistes évoluent-ils dans ces espaces subjectifs ?
Jacques Magnol & Yi-hua Wu
Débat le mardi 22 juin 2010, de 12h15 à 13h30, au Théâtre du Grütli (2e étage).
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