La chambre aux secrets de Maud Liardon

zelda-zonk

Si Marilyn Monroe demeure la figure idéale qu’adorait les hommes des fifties, sa mort sordide a donné lieu à  de multiples mises en exergue d’épisodes douloureux dans la vie de l’ex Norma Jean Baker.

 

Dans « Zelda Zonk », la chorégraphe et danseuse Maud Liardon offre notamment quelques éclats d’une sorte de martyrologue emblématique du destin des stars, aussi raide dans son déploiement qu’un chemin de croix : le viol, la solitude, l’alcool, les barbituriques. Le tout marié à  une danse propulsive, idéographique.

L’artiste n’oublie pas néanmoins que la star a fabriqué son image. Elle voulut être la maître d’oeuvre de cette image parfaite, un brin mécanique, de la séduction. D’où des instants d’exposition du corps façon « showtime » ou music hall : poses rappelant la pin-up d’antan, solo orientaliste avec roulis de jambes et mouvements de bassin ensorceleurs, clins d’oeil, au paradis figuré, des fameux ballets en piscine d’Hollywood. On songe ainsi aux plus grands succès du chorégraphe Busby Berkeley avec ses numéros époustouflants aux effets kaléidoscopiques.

Journal intime

De l’humour aussi, en forme de cours visant à  atteindre l’orgasme. Marilyn avait demandé au psy manipulateur Ralph Greenson de l’aider à  se lever, de l’aider à  jouer au cinéma, à  aimer et ne point trépasser. D’où une loufoque leçon sur la manière de se pencher sur son plaisir intime. Elle est délivrée par la danseuse métamorphosée en playmate superbe d’ingénuité. Ailleurs, mélancolie à  l’encre noire pour la chanson insistant sur le « I’m through with love » en des successions de postures brisées réalisées par la danseuse et chanteuse au micro. Elles peuvent évoquer, de loin en loin, PJ Harvey dans une atmosphère lynchienne de douleur fêlée et feutrée. Dans un monde fait souvent d’oppression et d’interdit, Maud Liardon s’invente une forme de journal intime, tant chorégraphique que littéraire ou décliné en chansons. Elle y mêle ses propres considérations au parcours chaotique d’une icône qui se souvient alors que la mort vient. Dans un espace blanc comme un linceul, elle nous convie à  une errance sous influence cinématographique. Le secret peut s’y révéler et le fantasme se dire en toute impunité.

Bertrand Tappolet

Maud Liardon Zelda Zonk”, ADC, Genève, du 4 au 15 novembre 2009,

Tagués avec : , ,
Publié dans danse