Le vilain petit mouton n’est pas celui que l’on croit

photo de répétition
“Le vilain petit mouton”, d’Olivier Chiacchiari, Théâtre des Marionnettes de Genève
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Dans leur petit enclos calme et douillet, des moutons découvrent avec effroi que l’on peut passer de l’opulence à la pénurie, contre toute attente. Gare alors à celui dont la laine est d’une couleur différente..

Ecouter l’entretien avec Olivier Chiacchiari:
Olivier Chiacchiari

L’auteur qui aime habituellement « molester son public » s’adresse cette fois aux enfants avec une satire sociale très loin d’être innocente. Comment les toucher tout en les faisant rire, sans tomber dans le didactique, avec des thèmes comme la peur, les préjugés, l’exclusion, la fraternité, la nécessité de remettre en cause l’autorité ? Avec Le vilain petit mouton, Olivier Chiacchiari leur conte une histoire d’amour où les dissensions du groupe d’ovins n’altèrent jamais l’atmosphère festive. « L’amour est l’expérience de l’altérité, écrit le philosophe Alain Badiou, dans l’amour, minimalement, on fait confiance à la différence au lieu de la soupçonner; la réaction, elle, soupçonne toujours la différence au nom de l’identité. Si nous voulons nous ouvrir à la différence, un des points praticables est la défense de l’amour.» … suite: écouter l’interview.

Jacques Magnol

Le vilain petit mouton Photo de repetition, Cedric Vincensini, Benjamin Vicq
1er rang de gauche à droite : Didier Carrier, Barbara Tobola, Jean-Michel Coulon et Xavier Loira. 2e rang de gauche à droite : Alexandra Tundo, Marc Berman, et Benjamin Vicq.

Comment j’ai composé la musique
par Marc Berman, le compositeur qui joue aussi de l’accordéon:

« Pour composer la musique du Vilain petit mouton je me suis posé une question: comment faire quelque chose de joli et naïf, mais toujours inquiétant? Pour le motif de base “On est bien“, j’ai pris le langage de Mozart des premières sonates et celui qu’il utilise lorsque lui-même s’inspire de la musique folklorique autrichienne (par exemple la chanson Das Veilchen, sur un poème de Goethe. Sachant que la musique folklorique suisse plonge ses racines dans la musique folklorique autrichienne et inversement. Plutôt que de partir directement de la musique folklorique suisse, j’ai préféré partir du langage mozartien parce qu’il est plus riche et permet de mettre de l’inquiétude là où la musique folklorique suisse est toujours naïvement joyeuse; dans la musique tonale techniquement c’est très facile à faire. Pour “On est bien”, par exemple je mets une grille harmonique en do majeur avec une mélodie en sol majeur.

A partir de ce langage, l’inquiétude vient par les arrangements: clarinette soprane et accordéon, c’est parfait pour le folklore helvétique, mais la clarinette basse, la guitare électrique et l’électronique sur l’accordéon permettent d’obtenir des timbres sombres. C’est plutôt Heiner Goebbels que Fred Frith que je pourrais citer comme source pour les types d’arrangement. Mais effectivement Fred Frith joue notamment dans Der Mann in Fahrstuhl, et ça m’a appris pas mal de choses sur le placement de la guitare électrique dans un ensemble hétéroclite.
Ensuite pour le thème de désherbage, par exemple, les contrechants  “ils mangent, ils mangent…”, bien en dessous de la mélodie, sont censés créer un malaise permanent. A nouveau, en résumé, chaque note à une place par rapport aux autres et provoque une tension.
Pour Lou Reed, je pense à Take a walk to the wild side, un peu pour le contenu, mais sur le plan des frontières politiques évidemment. Guy Jutard voulait quelque chose qui évoque la transgression, donc j’ai pensé à cette chanson dont le balancement harmonique – tonique-quarte – est également largement utilisé dans la musique folklorique suisse. »

Le vilain petit mouton.
Théâtre des Marionnettes de Genève.
Mise en scène: Guy Jutard. Texte: Olivier Chiacchiari.
Du 15 avril au 3 mai 2015.
Première création : 2 au 23 novembre 2011.

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